Frontaliers mariés assimilés et télétravail : soyez vigilants si vous dépassez 50 jours / an
Tous les frontaliers mariés sont rangés au Luxembourg en classe d’impôt 1 au même titre que les célibataires et les partenaires depuis la réforme de 2017.
Pour la très grande majorité l’imposition collective s’avère cependant bien plus avantageuse.
Il y a deux façons de l’obtenir :
- Soit en effectuant une déclaration annuelle (déclaration par voie d’assiette) l’année qui suit l’année d’imposition (N+1).
- Soit en l’anticipant pendant l’année d’imposition (année N). Ce choix :
- Modifie la retenue d’impôt de la classe 1 vers un taux déterminé sur le revenu mondial « probable ». Le taux est prélevé mensuellement.
- Rend la déclaration annuelle en N+1 obligatoire car elle permet l’ajustement des retenues à l’impôt réel.
- Induit automatiquement l’assimilation des couples mariés non-résidents aux couples mariés résidents.
Impacts fiscaux du télétravail
Par principe, un revenu est toujours imposé dans l’état où l’activité est exercée.
Un travailleur frontalier paie donc l’impôt sur le revenu au Luxembourg.
Cependant, lorsqu’ il est en télétravail, son activité est prestée en-dehors des frontières luxembourgeoises. Le Luxembourg perd alors le droit d’imposition des revenus du télétravail au profit de l’état de résidence.
Etant donné la particularité du Luxembourg dont la moitié de la main d’œuvre est frontalière, des accords ont été signés avec les pays voisins (France, Belgique et Allemagne) afin de déterminer un seuil de tolérance en-dessous duquel rien ne change. Le Luxembourg conserve le droit d’imposer 100% des revenus y compris du télétravail.
Ce seuil est fixé à 34 jours.
Ainsi, lorsqu’un frontalier réalise moins de 34 jours / an pour un temps plein de son activité en télétravail, il reste imposable 100% au Luxembourg.
Lorsqu’il dépasse ce seuil, l’ensemble des jours télétravaillés sont exonérés au Grand-Duché et basculent en imposables dans l’état de résidence.
Cette disposition est défavorable pour les frontaliers belges et allemands mais très intéressante pour les frontaliers français car l’impôt sur le revenu en France y est plus favorable.
Impacts pour les frontaliers mariés non-résidents assimilés
Vous êtes d’office dans ce cas de figure si vous avez opté pour l’attribution d’un taux de retenue comme nous l’avons vu précédemment.
Il y a toutefois une subtilité liée à ce choix : l’assimilation n’est possible que si et seulement si :
- 90% du revenu mondial est imposable au Luxembourg
- Ou bien que les revenus non imposables au Luxembourg (revenus étrangers) soient inférieurs à 13 000 euros.
Il suffit de répondre à l’une ou l’autre des conditions et lorsqu’il s’agit d’un couple de non-résident mariés, il suffit que l’un des deux conjoints réponde à l’une ou l’autre.
Exemple
Couple de non-résidents mariés dont les revenus sont les suivants :
- Madame travaille au Luxembourg et son revenu imposable est de 65 000 euros.
- Monsieur travaille en France et son revenu imposable est de 45 000 euros.
- Le ménage perçoit des revenus locatifs nets (après déductions) de 18 000 euros (répartit à 50% sur chacun des conjoints).
Ce ménage peut être assimilé car bien que Madame n’ait pas 90% de ses revenus mondiaux imposables au Luxembourg (88 %), ses revenus non imposables au Grand-Duché sont inférieurs à 13 000 euros (18 000 /2 = 9 000).
Quels risques induits par le télétravail ?
Suite aux accords européens sur la sécurité sociale de juillet 2023, un frontalier peut télétravailler jusqu’à concurrence de 49.90 % de son temps total et rester affilié au régime de sécurité sociale luxembourgeois.
Si nous traduisons cela en jours et en considérant qu’il y a en moyenne 222 jours ouvrables / an, cela représente un maximum de + ou 100 jours de télétravail.
Conséquence pour les frontaliers mariés assimilés ?
Comme vous l’aurez compris, si vous dépassez les 34 jours, le revenu sera exonéré au Luxembourg et imposable en France.
Dès lors le risque est de ne plus répondre à une des deux conditions d’assimilation.
Ce risque n’est toutefois réel que si vous dépassez 50 jours de télétravail / an car en dessous de ce seuil, le Grand-Duché considérera le revenu comme s’il était imposable au Luxembourg.
Si vous avez été imposé à la source selon un taux et que vous ne répondez plus à l’une des deux conditions, votre impôt sera recalculé en classe 1 mais en tenant compte du revenu mondial alors que si vous étiez resté en classe 1 il n’y aurait pas eu de conséquences.
Exemple
Reprenons l’exemple précédent. Madame a fait 100 jours de télétravail.
Son revenu imposable va être répartit comme suit :
- 29 280 euros imposables en France (65000/222*100).
- 35 720 euros imposables au Luxembourg.
Pour le calcul de l’assimilation seulement 14 640 euros seront retenus (correspondant aux jours de télétravail dépassant 50 jours).
Elle ne répond à aucune des deux conditions et ne peut plus être assimilée.
L’impôt va être recalculé en classe 1 mais tenant compte de ses revenus mondiaux pour le calcul du taux (35 720 + 29280 + 8000) soit 23.26 % car la déclaration annuelle permet de révoquer l’assimilation mais pas la demande de taux.
Si elle n’avait pas opté pour l’établissement d’un taux de retenue, elle aurait été en classe 1 et son taux d’imposition aurait été de 9.76 %.